jeudi 22 novembre 2007

De Dimanche à Lundi...

Il était bientôt huit heure du soir, dimanche. Il faisait déjà noir depuis un bon bout de temps. Ça faisait presque une semaine que j’appréhendais ce jour. J’avais déjà fermé la porte de la voiture, j’étais en route. Je ne pouvais maintenant plus me désister. Tout était arrangé, j’allais dormir dans la favela pour les besoins de mon documentaire. Moi et mes idées aussi! Parce que c’était mon idée d’aller filmer le levé du soleil. Pour cela, je devais donc me levé tôt. La solution fut trouvé j’irais dormir là-bas. Je l’avoue maintenant que tout est terminé... j’ai flippé quelques minutes dans l’auto. On y allait à toute vitesse, défilaient tout près de moi bicyclettes et motos, camions et virages serrés. Quelques coups de klaxon parvenaient à mes oreilles, la normalité quoi! Moi je me cramponnais à la poignée de la porte pas nécessairement parce que je ne croyais pas en les capacités de mon chauffeur, non! Je cherchais plutôt une bouée à laquelle m’accrocher, par manque de ressources, ce fut la poignée. Afin de me sortir de ma torpeur, je décidai de parler avec Seteofe (si c’est comme ça que ça s’écrit!). Je n’avais pas envie, mais je voulais juste me rassurer. Bon de quoi pouvais-je bien parler? « Ouais il parait qu’ils ont encore tués quelqu’un dans la communauté en début de semaine. » Il me dit : « Bof, ils tuent quelqu’un presque tous les jours. » Merci, c’est rassurant.

Je suis arrivée là... Ok tout était passé et j’étais contente d’être là. J’allais dormir chez India, chose que je ne savais pas avant d’arriver. J’étais bien heureuse d’apprendre la nouvelle, on est toujours mieux avec de la compagnie féminine. Pas que les hommes sont affreux non mais je croyais jusque-là que j’allais passer la nuit chez Nerta, un homme qui travaille à rendre la communauté de Rosalina meilleure. En parlant de loup c’est à peu près à ce moment qu’il entre dans l’histoire. J’étais sur le divan et il traversa la rue (si on peut appeler ça une rue) pour venir me chercher. À ce moment même, j’étais en train de combattre une déshydratation intense due à l’insolation que j’avais fait samedi. « Me chercher pour aller où? » Demandai-je, un peu réticente à l’idée de sortir. « On va danser du forro » Ok, j’étais morte de fatigue et qui plus est, je n’aimais pas particulièrement le forro. Bref je conclus que j’allais m’y rendre juste pour voir. Ok ce n’était pas parce que j’étais au bout du monde, qu’on me répétait depuis que j’étais arrivée que le pays était dangereux, que j’allais manquer une occasion de sortir dans un bar en plein milieu d’une favela. En vérité, j’aurais bien aimé que toutes ces raisons m’empêchent de sortir de la maison. Lucie, une femme au regard sévère assise en face de moi, allait donc nous accompagner jusque là. On arrête donc en route chez des amis de Nerta. On est assis là au milieu de la poussière, tout près du site de construction des nouvelles maisons. Se tenaient fièrement là, 2 homosexuel et un travestie. Ils parlaient fort et avait l’expression du peuple d’ici : un visage calme, dur et plein d’histoire. Ils me saluèrent humblement, sans joie, sans peine non plus. Nous sommes restés assez longtemps pour me convaincre que je n’avais aucunement le goût d’aller danser le forro avec un tas de gens saouls autour de moi. Déjà que, je ne l’ai pas mentionné, mais mon taux d’alcool devait probablement être encore au-dessus de la moyenne à ce moment. Alors arriva de nulle part la proposition de Lucie. D’un ton ferme, elle affirma qu’elle allait retourner à la maison en ma compagnie. Je n’ai pas eu à dire quoi que soit. C’était décidé, il était hors de question que j’aille dans cet endroit. J’ai remercié pour une deuxième fois la solidarité féminine ce soir-là. Nous fîmes de brefs aurevoirs et étions déjà à la maison avant que j’aie pu affirmer le fond de mes pensées.

Finalement, s’ensuivit une soirée presque normale mise à part le fait que j’étais dans une toute petite maison où la seule pièce qui existait faisait office de cuisine-salon-chambre-à-coucher-séparé-par-un-drap. Un petit chalet en plein coeur d’une quartier pauvre de Fortaleza. Le lendemain matin, je mangeai mieux qu’à la maison. Le pain, le fromage, les oeufs, tout était meilleur. Je me suis bel et bien levé à 3h30 du matin pour traverser le quartier en compagnie de 2 habitants de la communauté et 2 policiers. On est resté plantés là 2 heures, à parler de tout et de rien. Vers 5h30, est arrivée une voiture demandant sa direction. « Est-ce que c’est dangereux dans ce coin en ce moment? » a demandé l’un des hommes dans la voiture. « Ne t’en fais pas, ils l’ont déjà tué hier, ce ne serait pas toi aujourd’hui », répondit un des deux policiers. Tout le monde éclata de rire. Comme dit le dicton : Vaut mieux n’en rire que d’en pleurer!

mardi 20 novembre 2007

L'école sur le banc



C’était dans le bureau de l’ingénieur du projet de constructions des nouveaux HLM (si on peut appeler ça ainsi), en train de parler tout bonnement de mon projet de documentaire qu’on entendait depuis une bonne dizaine de minute quelqu’un parler dehors. Je finis par demander ce qui se passe à l’extérieur. L’ingénieur me répond tout bonnement que c’est une réunion syndicale. J’ouvre la porte pour examiner ce qui se trame dehors. C’est bel et bien ça. Tout le monde est là. Les travaux sont arrêtés et l’on discute de conditions de travail. Je suis dans la Favela et quelqu’un arrive pour m’amener autre part. Ce n’est pas le temps de demander un délais, ça fait déjà 1 heure que j’attends que quelqu’un vienne me chercher. Dans la communauté de Rosalina, je ne peux pas me permettre de me déplacer seule. Je suis blonde, blanche (ou plutôt rouge), j’ai un accent étranger et je me promène avec mon appareil photo, ma caméra, mon cellulaire, mon microphone et mes tonnes de questions. Tout ce matériel vaut beaucoup et ma vie, un peu plus. Bref, je n’ai pas le temps de savoir la conclusion des évènements auprès des travailleurs.

Un peu plus loin, se dresse un autre chantier : une école en construction. Elle est là, postée à l’entrée de la Favela, mais rien ne passe à l’intérieur. Personne n’y entre, personne n’y sort, personne n’y travaille. Comment se fait-il que cet établissement soit vide. En fait, l’école est en construction. Cela fait partie du projet de développement de la mairie de Fortaleza. Un projet qui devrait s’étendre sur 2 ans, mais à parler avec l’ingénieur des travaux, on comprend bien que ça va durer beaucoup plus longtemps,trois, quatre,cinq ans peut-être. On a déjà promis beaucoup de choses à la population. Elle commence déjà à s’impatienter. Pour ce qui est de l’école, on couvre bientôt ce sujet. Lors d’une assemblée de rue entre la population et Ortins, figure de proue de la mairie pour mobiliser la communauté, on démontre un peu de colère. Ortins explique bientôt le problème, ce qui décourage la population. Encore là, la corruption s’est infiltrée dans le projet de développement. Il veut bien régler le problème rapidement, mais tout ceci est au-dessus des forces. Ça prendera un peu plus de temps que prévu. On essayera de notre mieux. Tranquillement, on parle donc d’organiser une manifestation chez le propriétaire de la compagnie sous-traitante. En blague, on propose de tuer toute cette vermine. C’est le seul moyen que possède la communauté pour manifester leur mécontentement. La corruption, ce n’est pas un nouveau terme pour personne, mais c’est toujours décourageant d’avouer qu’on en est victime.

Un peu plus tard, au courant de la journée, on apprend les conclusions de la réunion syndicale de l’autre chantier, celui des nouvelles habitations où toute la population déménagera bientôt. C’est le jour de paye aujourd’hui et la plupart des travailleurs ont arrêté de travailler jusqu’à ce qu’ils reçoivent leur dû. Par-dessus tous ça, une légère odeur flotte partout dans la favela, celle provenant des eaux usées de la communauté à moins que ce soit l’odeur de l’argent qui est montée au nez des entrepreneurs.

lundi 12 novembre 2007

Mon périple à Jericoacoara





Je me suis finalement décidée à mettre quelques photos que j'ai pris à Jericoacoara. Vous pouvez cliquer sur les photos pour les agrandir....

Courte sur patte

On est samedi après-midi et il fait chaud (comme d’habitude). N’étant pas de la place, j’aime bien essayer de nouvelles places, des petits cafés sympas et explorer un nouveau coin de la ville. Ma destination : le café La Habarera, un petit café où l’on y vend de bons cigares. Je prends donc l’autobus Circular #1 pour m’y rendre. La fin de semaine, je ne sais pas où est toute la population de Fortaleza, mais en tout cas, elle ne se trouve pas dans les autobus. Pour m’y rendre, je fais pratiquement le tour de la ville, d’où le nom de l’autobus (circular). Pendant le trajet, je regarde partout, j’entends bientôt à l’extérieur une femme, je sorts de la lune et cherche d’où ça vient. Elle court vert une auto de police, le temps de passé devant, on voit bien qu’elle est en panique. L’autobus continue sa route, je ne saurai jamais ce qui lui est arrivée. La chose est que ça arrive souvent. Par chance, ce n’était pas moi. Parce qu’il faut compter sur la chance, Ça arrive.

Bon, je me rends à destination. Encore là, il n’y a pas grand monde dans le café. Tout le monde est je ne sais où mais pas à La Habanera. Je m’assieds, je commande un café et une bouteille d’eau (parce que je viens sûrement de perdre un litre d’eau déjà). Je commence à lire, faut dire que mon livre est très intéressant et de toute manière, je n’ai personne d’autre avec qui parler. Passe un moment et une vieille dame entre. Elle semble être une habituée de la place. Petite, cheveux courts et blonds, rondelette : ça pourrait être moi dans 60 ans. Même si on est au Brésil, pays du culte du corps, ici dans le Nordeste (Ceara) tout le monde est un peu grassouillet. Le miroir parfait du Québécois moyen : un peu de bedaine en trop. J’en conclus que c’est parce qu’on met du sucre partout ici. Alors ma petite dame s’assied. Moi, je continue à lire. Tout bonnement comme ça, plus tard, elle me parle. On discute de livre. Elle me raconte sa vie. Elle parle portugais, français, grec et italien. Elle a voyagé au Moyen-Orient en Europe, en Amérique Latine et en Asie. Elle a pratiquement fait le tour du monde et toute seule, à chaque fois. Maintenant, dans ses temps libres, en semaine, elle court sur la plage pour se garder en forme. Un jour, en exerçant ce sport, quelqu’un s’est exclamé :« Mais c’est une vieille! » Oui et puis après!

Petite bulle d’énergie, elle me raconte qu’elle approche les 90 ans. Je ne suis pas vraiment tombé de ma chaise, mais presque. Si je peux avoir cet éclair dans les yeux cette énergie pour courir sur la plage à son âge, ça ne me dérangerait pas d’être comme elle. Je la regarde avec un sourire béat étampé en pleine face. On termine notre discussion et elle part ainsi, petite, cheveux courts et blonds, rondelette.

lundi 5 novembre 2007

Alphaville

À quelques kilomètres de Fortaleza, se situe la zone de protection environnementale de Sabiaguaba, zone qui, en été, forme une rivière où les habitants peuvent y pêcher humblement. Lorsque la saison des pluies arrive, la rivière se gorge d’eau et y alimente une grande biodiversité. La zone protégée héberge deux types de végétation : les mangroves, petite forêt marécageuse où les crabes y vivent et la végétation typique du littoral du Ceara. Une dune de sable s’étendant jusqu’à la mer surplombe toute la zone.

Mise à part l’immensité de Fortaleza que nous apercevons du haut de la dune. Quelque chose d’autres capte notre attention. Des colonnes de bétons se tiennent debout et traversent le rio de façon imposante. En fait, ces colonnes sont le vestige d’anciens travaux de l’état du Ceara. Celui-ci y voulait y construire un pont pour faciliter l’accès à l’endroit et y développer le tourisme. On aurait ainsi détruis une bonne partie des mangroves et brisé la poésie du paysage. En 2003, la mairie de Fortaleza change de gouvernement et réussi a y arrêter les travaux en faisant de cet endroit une « area de protecao Ambiental », zone de protection environnementale. Cette catégorie de préservation est d’ « uso directo », utilisation directe, on peut donc y exploiter les ressources en respectant leur conservation. Les immenses colonnes de bétons ont donc été laissées à elles-même au milieu du paysage. Un peu plus loin, se dresse les vestige d’une ancienne dune, à présent applatie, y hébergeant nom pas une diversité biologique mais une calmité humaine : Alphaville. On y a applanie une immense dune de sable pour y construire des condos, endroit préviligié pour ceux qui veulent prendre un petit bain de soleil. L’endroit ne permet toutefois pas aux gens de la classe moyennement faible d’y tenir logis.

Reste à savoir jusqu’à quel point ces zones de protection environnementale sont protégées puisqu’il n’existe pas encore de loi permettant de donner une amande
à quiconque ne respectant pas l’endroit En se promenant sur les dunes, on y rencontre bon nombre de déchets, sacs de plastique, vitre ou autre, résultat d’une fête bien arrosée. De toute évidence, même lorsqu’on y instaure de telles lois, elles ne sont malheureusement pas plus respectées. D’où là, l’importance de sensibiliser la population. La fragilité des lieux y est toujours menacée et, avec ses faibles ressources, la mairie tente tant bien que mal de prévoir les coups.